Item : Les courus et leur mode de vie
Général
- Titre
- Les courus et leur mode de vie
- Description
Les informateurs nous expliquent qui sont les "courus" (mendiants), les lieux où ils peuvent dormir et comment ils vivent leur vie. Ils racontent avec plus de précision la vie de certains et comment ils en sont arrivés à cette situation.
Personnes
- Informateurs
- Jules Fortuné
- en 1976-03 à Cuhon Informateur
Indications géographiques et culturelles
Données d'archivage
- Cote
- UPOI_GDC_0013_0004_012
- Cote de l'item dans l'institution partenaire
- GDC00049b piste 2 - item 008
Données techniques
- Durée estimée
- 00:06:17
Médias associés
Description
Genres
- Domaine(s)
- Témoignage
Texte/Paroles
- Paroles
Légende :
Italique : dit par l'enquêteur·trice(s) et/ou ajouts/commentaires de l'analyste
Normal : dit par l'informateur·trice— Est qu’il y avait des mendiants ?
Jules : — Oui, j’ai connu ça, moi. J’ai connu ça parce que mon grand-père était maire, et alors ils venaient s’adresser chez le maire. Pi alors, y avait un toit : i têt, mais il était privé parce qu’il nous appartenait. Mais en général, dans toutes les communes y avait un toit pour le « couru ».
Alors moi, j’aimais bien quand il venait. I vendait des chansons, ces fameuses grandes chansons avec la carte de France ou un drapeau tricolore dessus. Les chansons, à ce moment-là étaient patriotardes etc… Pi également des chansons un peu grivoises, y avait de tout. Alors, il m’en donnait alors, j’étais content.
— Mais à Cuhon, y avait un personnage important qu’avait logé dans ces toits aux « courus » ?
M. de Cuhon : — Ah oui, ici, à l’endroit où on est, place de la Mairie. Ribelin, il vivait continuellement dans les toits, dans ces deux toits qu’étaient là.
— Qu’est ce qu’il avait de spécial ?
Jules : — Oh, rien du tout, il était fainéant.
— Il était de Cuhon même ?
M. de Cuhon : — Non, de Bilazay, mais il était venu se marier, ici.
Jules : — Bilazay, c’est vers Assais ….
M. de Cuhon : — Bilazay, non, c’est vers Oiron !
Jules : — Ah oui ! Mais on a Bilazay chez nous !
M. de Cuhon : — … Il avait divorcé, pi il était venu habiter ici, il y est resté 10 ou 15 ans…. Je l’ai toujours connu là-dedans. Justement, y carne qui lfaisait mettre en colère. A chaque fois qu’i y avait un vrai couru qui passait, i voulait lli donnait de place. A chaque fois, fallait que Roger Martin vienne pour le faire mettre dans un toit pi la couru, l’autre, dans l’autre toit.
Jules : — On leur faisait donner les allumettes. I couchaient dans des fermes quelquefois, alors fallait qu’ils donnent les allumettes. On en voit plus, y avait quelquefois pourtant des courus qu’étaient pas ordinaires. Y en avait un, i s'appelait « Mort de froid ».
M. de Cuhon : — Y en a eu un à Massognes ?
Jules : — C’était le plus riche de Massognes, il avait un château.
M. de Cuhon : — Oui, mais i se promenait sur les routes comme ça !
Jules : — Ben, oui i se saoulait lui aussi, pauvre vieux. L’a été tué d’un coup de fusil par un gosse de huit-dix ans. Il s’était marié avec la sœur à Béranger, marchand de bicyclettes, le gars qu’avait monté le Galibier 5 ou 6 fois. J'sais pas, un type qu’était venu là aussi. S’était marié avec une fille du pays. Un espèce de Titi (parisien), il était amusant.
— Ce mort de froid qu’est ce qu’il avait ?
Jules : Ce «mort de froid » (le premier, pas celui qui habitait Massognes et qui avait été tué par un enfant), ça m’a été raconté par un gendarme, qu’était mon ami, qu’était Elie Cosson de Massognes, qu’était en brigade je ne sais où. Alors un beau jour, ils reçoivent l’ordre :
« Laissez « mort de froid tranquille » !
Alors quand il a passé, ils l’ont fait rentrer pi ils ont causé. « Bon ! i dit faudrait que vous me signeriez votre,… je ne sais pas quoi, moi ». Il dit, i me fout un paraphe extraordinaire.
« Vous savez écrire, monsieur ? »
Il dit oui ! C’était un journaliste et au moment des anarchistes, au moment, je ne sais pas où ça c’est passé, peut-être de Ravachol ou à cette époque là, on a institué le carnet B.
Ce carnet B, c’était (issu) d’une loi scélérate, comme on en a pondu d’autres, d’ailleurs et le type, c’était fini, et il est devenu mendiant. Il n’a jamais pu se raccrocher et c’est devenu un mendiant.
J’en ai connu un autre, c’était « Barbe Blanche » on l’appelait. Il avait toujours une barbe impeccable. Il couchait tout nu dans un sac.
M. de Cuhon : — Y avait « ptit jean », la « crème Simon », i s’appelait « la crème Simon ».
— I passaient toujours les mêmes à la même époque ?
Jules : — A peu près
— A peu près ! I faisaient aucuns travaux, rien ?
M. de Cuhon : — Non, oh quelquefois, des petites bricoles pour avoir un repas, remplir un sac.
Jules : — La charité, On donnait du pain, un morceau de pain. Chez nous, y avait toujours un morceau de pain.
— A cette époque, les gars qui passaient sur les routes, ils avaient un bissac.
Jules : — Le bissac, c’est un sac que l’on met la moitié d’un côté, la moitié de l’autre.
— Qui c’est les gens qui partaient comme ça avec leur bissac ?
— Ils allaient chercher du pain. Mon grand-père de Battreau racontait toujours : y a des gens qui s’amènent (ça a bien évolué depuis) chercher leur pain. Y en a trois. Le troisième, ben dit « d’où vous êtes don? », « de Puysan ». Les deux autres étaient de Puysan, mais alors i dit : « i cherchent tous leur pain à Puysan (hameau le long de la forêt d’Autun, commune de Thénezay (79)). C’est inimaginable comme ça a pu évolué.